Chaque année, 3 stations de ski sont contraintes à la fermeture en France. Alors que certaines, comme La Sambuy (Haute-Savoie) contribuent à faire monter ce chiffre (la station a fermé en août), d’autres changent de stratégie sans pour autant ne changer de modèle : le tout ski, oui, mais pas sur tout un domaine.

La semaine passée, nous faisions le point sur la situation désastreuse du manteau neigeux dans les Alpes. Tandis que certains grands acteurs du ski munis d’enneigeurs parviennent à contenir la situation, d’autres domaines plus restreints de moyenne ou basse montagne sont contraints de revoir intégralement leur modèle, à l’image de la station de Saint-Pierre de Chartreuse, du Col de Porte ou de Menthières.

Saint-Pierre de Chartreuse

Fondée en 1938 sur la commune éponyme, la station de ski de Saint-Pierre de Chartreuse se construira autour d’un axe privilégié très rapidement : le télécabine des Essarts, et se développera autour de 2 fronts de neige. Le principal, situé à 500 mètres du village sera vite relié à la station du Planolet, à quelque 1 kilomètre du principal par une route départementale.

Situation du domaine en 2019

En 2020, l’axe principal du domaine est clôturé, et non remplacé. Les habitants de la commune, dont l’économie repose essentiellement sur le ski sont inquiets : la fin de cet axe signifie t-il la fin du ski à Saint-Pierre de Chartreuse ?

Après la crise du Covid, la station peine à remonter. En 2020, le télésiège moderne de la Combe de l’Ours, inauguré en 2006, deviendra le principal axe de la station, les remontées des Essarts (précédemment évoquée) et de la Scia, autre grand axe portant les skieurs au sommet du domaine ayant été clôturées.

Le seul télésiège permettait l’accès à 33 kilomètres de pistes. La situation semblait stabilisée, et le modèle économique fonctionnel. Cependant, les nombreux hivers sans neige ont fait défaut, et le télésiège a pour la dernière fois tourné en 2022.

La station de Saint-Pierre est actuellement dans un statut ambigu : elle n’est pas clôturée définitivement officiellement, mais pas ouverte aux skieurs pour autant. Cependant, elle semble condamnée, et des réunions publiques portant sur son avenir semblent marquer l’arrêt de mort du domaine.

Malgré tout, en 2023, la ville de Saint-Pierre de Chartreuse a annoncé mettre à disposition une délégation de service public pour l’exploitation du domaine « Coeur de Chartreuse » (Saint-Pierre / Le Planolet). Ce fut l’association « Nouvelles Traces en Chartreuse » qui l’obtint. Cependant, celle-ci n’exploite que le secteur débutant du Planolet, et laisse de côté les 30 autres kilomètres de pistes, et le télésiège. Ainsi, l’évolution du plan des pistes semble être la première étape vers la fin du ski en Chartreuse.

Le domaine Saint-Pierre / Le Planolet en 2021

Le Planolet aujourd’hui

La station n’ouvre seulement les mercredis, week-ends et jours feriés lorsque les conditions d’enneigement le permettent.

Col de Porte

La situation à Saint-Pierre de Chartreuse rappelle celle de la station du Col de Porte / Sarcenas. Située à 10 minutes en voiture de « Cœur de Chartreuse », celle-ci a également subi un rétrécissement important et progressif.

Initialement située à cheval sur 2 (voire 3) secteurs (Chamechaude et Charmant Som / Prairie), la station a commencé à rétrécir dès 2006, avec la fermeture du secteur du Charmant Som, constitué du télésiège éponyme. Celui-ci, situé sur la commune de Saint-Pierre de Chartreuse, ne sera pas réexploité après la faillite des exploitants du domaine et le rachat de celui-ci. Aujourd’hui encore, il est laissé à l’abandon, et sa ligne non fonctionnelle est le témoin d’un temps révolu du ski sur le Charmant Som.

2 secteurs restaient alors exploités au Col de Porte, Chamechaude et Prairie, amputés de la moitié du domaine. Ceux-ci furent exploités jusqu’en 2022, date à laquelle le secteur Chamechaude fut transformé en secteur entièrement fondé sur le Ski Nordique.

Aujourd’hui, seul reste le domaine débutant de la « Prairie », rappelant la situation du domaine voisin évoqué précédemment. La prochaine étape semble proche, et s’annonce comme étant la clôture totale du domaine, bien que non encore évoquée.

Le Col de Porte avant 2006

Le Col de Porte avant 2022

Le Col de Porte (Prairie) en 2024

Dans le Jura, à Menthières, un phénomène identique

Le domaine des Monts Jura (Pays de Gex) est composé de 3 sites indépendants les uns des autres. Parmi eux, le domaine de Lélex-Crozet est le plus conséquent, et domine les deux autres sites. Menthières est le plus petit des 3 depuis sa création. Basé autour du télésiège de la Pelaz, celui-ci proposait jusqu’à la saison dernière (2022-2023) un domaine d’exception pour les skieurs confirmés, bien que le nombre de pistes n’excède pas les 9.

En 1987, date d’inauguration de la station sous sa forme « grand domaine » (un téléski avait déjà été installé auparavant), le domaine était composé de 5 remontées, permettant l’accès à tous niveaux de pistes de ski (excepté noir). Cette année, en 2024, le domaine a laissé tomber 3 de ses installation « modernes », et n’a maintenu encore une fois en service seulement son domaine débutant.

Ainsi, toute une économie de village fondée sur le ski s’apprête à s’écrouler. Lla possibilité de remplacer le télésiège par un tire-fesses est évoquée, mais le projet semble illusoire et démesuré par rapport au temps d’ouverture annuel, parfois n’excédant pas les 3 semaines.

Le domaine jusqu’en 2023

Le domaine aujourd’hui

Ainsi, la fin du « tout-ski » à 100 mètres semble annoncée. Les stations de ski de moyenne montagne semblent suivre une dynamique de division de la taille de leur domaine parfois jusqu’à 20 (Saint-Pierre de Chartreuse), et de passage en modèle associatif pour certaines (Le Granier également avait suivi cette voie).

N’envisageant pas une fermeture pure et simple de leur domaine skiable, ces stations villages maintiennent en service seulement leurs espace débutants, en attendant une reconversion « 4 saisons ». La fin du ski en moyenne et basse altitude n’est pas seulement annoncée. Elle semble confirmée.